Rechercher des informations c’est, bien souvent, suivre son désir. Sans savoir où il nous mène.
Le désir, par opposition à la raison (ce qu'on appelait classiquement "la raison"). Autrement dit, rechercher des informations et « se mettre au courant des actualités », c’est suivre un désir et non agir rationnellement.
A partir de ce constat (qui est discutable!), on peut déduire plusieurs observations:
1. La recherche d’information est erratique et aléatoire
La recherche d’information, dans le domaine de l’actualité, n’est pas une science exacte. Le hasard entre en jeu. Parfois, on passe à côté d’une information. Une autre fois, on la trouve sans la chercher.
- Sérendipité. Ce phénomène est résumé dans le mot « sérendipité ». Le mot est bizarre et la chose aussi. La sérendipité c’est le fait de trouver une information de façon imprévue.
Sur Internet la recherc
he d’information semble guidée par la sérendipité. Le bouton « j’ai de la chance » sur la barre de recherche Google témoigne de cette « croyance » : grâce à Internet on finit toujours par trouver ce qu’on cherche. On a le droit de se perdre. On retrouvera toujours son chemin.
Se perdre, c’est suivre son désir. Trouver, c’est vérifier que le désir est bon. Enfin, pas toujours...
- Wilfing. Le phénomène a aussi des aspects négatif. La recherche d’information sur Internet peut nous perdre totalement.Le wilfing est un mot valise pour « What Was I Looking For”. C’est la réflexion qu’on se fait souvent: “mais qu’est-ce que je cherchais, déjà?”
- Buzz. Quand le désir d’une communauté converge vers un point, on obtient ce qu’on appelle le buzz. Et quand le buzz est énorme, on peut parler d’emballement médiatique. Tsunami, mort du Pape, mort de Michaël Jackson, etc.
Le buzz ou l’emballement médiatique sont le produit du désir des foules. Ils le rendent visibles. Le buzz est tout sauf raisonnable. Il est incohérent, imprévisible et parfois incompréhensible.
On s’afflige, on se plaint. Mais l’humanité est ainsi faite : c’est le désir et non la raison qui guide la recherche d’information.
2 Les médias sont des outils conçus pour le désir
Si l’on observe comment évoluent historiquement les médias, on s’aperçoit qu’ils sont conçus pour se plier au désir des « consommateurs d’informations ».
Les journaux présentent les nouvelles de façon désirable. La télévision s’adapte aux fluctuations du désir grâce au zapping. Internet accélère le processus avec la possibilité de cliquer, d’ouvrir plusieurs fenêtres et de développer des flux d’information.
- A l’époque où prédominaient les journaux, le désir d’information s’épenchait de façon plus ou moins libre. On avait la liberté de choisir un ou plusieurs journal. Et, à l’intérieur du journal, on pouvait vagabonder librement.
- Avec l’arrivée de la télévision, et de la télécommande, les possibilités se sont accrues. Le média télévisuel donne l’impression d’être en contact avec l’information. Ce sentiment est renforcé avec la multplication des infos en direct et le tout info (des chaînes en continu comme LCI).
- Internet a rendu la recherche d’information encore plus souple. Selon ce que je désire chercher, je peux disposer de dizaines de sites différents, lire des articles, voir des vidéos, entendre des interviews, télécharger de lourds rapports
3 Informations de plaisir
La conséquence du désir, c’est parfois le plaisir. Rechercher des informations est un plaisir. Et le plaisir devient souvent le but ultime. Le recherche d’information est hédoniste.
C’est sans doute ce qui explique le succès des « informations de plaisir »* que sont les information people ou l’information sportive. Ces deux secteurs connaissent un développement important.
4 Des hiérarchies déraisonnables raisonnables
La recherche d’information n’est pas raisonnable. C’est peut-être ce qui la distingue de l’acquisition de connaissance et de la recherche de savoir.
La hiérarchisation des informations doit tenir compte de cet aspect des choses. Ce n’est pas l’information objectivement la plus importante qui sera valorisée, mais celle qui sera la plus désirable.
Les tenants d’un « journalisme à l’ancienne », les partisans du « cercle de raison » et les « pisse froid » rejettent cette hiérarchie des informations. Ils souhaiteraient que soient mises en avant les informations sérieuses, les faits et les idées. Ont-ils raison d’être raisonnables ?
* on peut parler d’information de plaisir, comme Roland Barthes parlait de « texte de plaisir » dans le Plaisir du texte.