Ce billet poursuit la série débutée il y a quelques jours. Voici les autres billets: 1. Présentiser 2. Négativiser 3. Décontextualiser 4. Mythologiser 5. Provincialiser 6. Dominer 7. Emouvoir
6. Dominer
Le trajet de l'information est, traditionnellement, vertical, de haut en bas. Je parle, bien sûr, des médias traditionnels comme la télévision ou les journaux.
Les médias portent la trace des fortes hiérarchies qui régissent la société.
Comme l'écrit fort justement Patrice, "dans les sociétés modernes, les pouvoirs se sont jusqu’à présent concentrés au sommet d’une hiérarchie de fait. Un petit nombre produisait de la connaissance et des idées; un petit nombre les sélectionnait et les diffusait. Par delà les apparences et les symboles, l’information circulait pyramidalement, relayée par les médias de masses et par les grandes institutions politiques ou sociales".
Or, ces hiérarchies sont, semble-t-il, en train de s'effondrer, grâce à l'évènement des nouveaux médias.
"Les nouvelles technologies médiatiques multiplient les moyens de création. Partout, les canaux de diffusion et de discussion se developpent au rythme de la pensée. D’innombrables barrières s’affaissent entre producteurs et consommateurs d’idées, entre propagateurs et inventeurs de règles, entre hiérarchies de normes et choix de valeurs."
J'ai bien dit "semble-t-il", car qu'en est-il réellement de ce changement? L'ère d'Internet annonce-t-elle une démocratisation?
photo: AP
Commentaires
Les ères de Gutenberg et de Marconi se caractérisaient, me semble-t-il, (i) par une diffusion en masse vers les masses, (ii) d'objets sélectionnés par les propriétaires de moyens de diffusion coûteux s'appuyant éventuellement sur les détenteurs supposés du savoir (académies).
Dans l'ère numérique, les barrières placées à l'entrée du processus de production et de transmission des connaissances s'abaissent quasi totalement, la sélection disparaît et le lecteur est confronté à la masse des "produits", sans autre repère que son esprit critique et, le cas échéant, la "sagesse des foules".
Est-ce l'annonce d'un progrès démocratique ou d'une régression démagogique?
Je penche pour le progrès démocratique mais ce n'est encore qu'une croyance optimiste. Sa validation me paraît dépendre prioritairement d'un recentrage de nos systèmes éducatifs et de notre culture sur le questionnement, le doute et la critique.
Ce qui me semble positif en soi, d'un point de vue libre-exaministe. Mais sans ce recentrage...
Le foisonnement des expressions, critiques, analyses... est à la fois la richesse et la faiblesse d'Internet me semble-t-il. Difficile à un non habitué des blogs de s'y retrouver. Et difficile aussi aux habitués de se créer de nouvelles sphères de lectures. Il manque des pôles de centralisation qui selon une ligne éditoriale claire et critique pourraient faire le tri de la blogosphère existante, en traçant des chemins de promenade dans cette forêt touffue des opinions, des analyses et expertises. Ce serait très possible avec beaucoup de temps. Il manque clairement un modèle économique pour que cela soit possible.
Je crains que ce ne soit qu'une illusion. La masse des blogs et pas toujours des plus intéressants (je vise ici les buzzmen du people) me semble un frein à cette démocratisation.
Il y a biensûr les wikio et autres pour essayer d'éclairer certaines parties du oueb mais est ce suffisant ?
La totale anarchie éditoriale est-elle une bonne chose ?
:-)))
@charles,
"Je penche pour le progrès démocratique mais ce n'est encore qu'une croyance optimiste. Sa validation me paraît dépendre prioritairement d'un recentrage de nos systèmes éducatifs et de notre culture sur le questionnement, le doute et la critique.
Ce qui me semble positif en soi, d'un point de vue libre-exaministe. Mais sans ce recentrage..."
D'accord avec toit. Cela nécessite un investissement lourd des Etats dans l'éducation, semble-t-il. Des Etats et des individus.
Il y a un problème pour poster des commentaires. Soyez patient, ça va bientôttre répéré, j'espère.
@Isabelle,
Oui, si l'on souhaite retrouver dans les blogs un modèle de verticalité (pour être certain que le lecteur trouvera des informations fiables). Mais on peut préférer ce foisonnement, qui permet d'aller à la rencontre d'auteurs.
Certes, pour eux, pas de modèle économique pour rentabiliser leur activité (et à terme ça pose problème), mais une plus grande autonomie.
@Eric : je ne pense que c'est possible sans verticalité. La blogosphère est comme un réseau neuronal qui manquerait de centres qui recueillent les informations, les compilent et les analysent selon des critères précis et affichés et renvoient vers les neurones/blogueurs.
Sur le modèle économique, je suis effarée de voir le ton de certains commentaires qui attaquent bassement le blogueur : les auteurs de ces commentaires semblent oublier que le blogueur met à profit GRATUITEMENT son temps et son savoir pour partager des opinions et provoquer une réflexion. Il me semble que cela existait moins il y a un ou deux ans. De plus en plus de lecteurs se comportent comme des consommateurs ingrats profitant d'une tribune qui leur est courtoisement laissée pour épancher leur fiel plutôt que de discuter d'opinions. Difficile à recevoir pour le blogueur qui lui est dans le don.
@Isabelle,
C'est possible. Cela m'arrive rarement, heureusement.
Mais pour nuancer ce que tu dis, je dirais que le blogueur est dans le don mais aussi dans le narcissisme. Donner de l'information, c'est un don relatif...
test
test aussi
@Cratyle,
Il n'y a que le taulier qui a le droit de faire des tests sur son blog! Attention: rétablissons un peu de verticalité!
Est-ce que "L'information, c'est le pouvoir" est toujours d'actualité ?
Bonne question...
Personnellement, je crois que oui.
Partager l'information, c'est perdre quelque chose.. à moins que l'on ne gagne autre chose en retour...
@bertrandD
"Partager l'information, c'est perdre quelque chose" : partager l'information, c'est aussi en multiplier la richesse.
Si on voit "pouvoir" dans le sens du verbe "pouvoir", cela change tout : Partager l'information, c'est multiplier les pouvoirs de chacun. Si ces pouvoirs sont exercés dans un même objectif (ex très actuel : l'écologie), alors au contraire, partager l'information devient un sacré gain et une vraie source de pouvoir, non ?
@Isabelle,
Je crois discerner deux conceptions du pouvoir: l'une centralisée, détenue par quelques uns, l'autre ouverte à tous.
@BertranD,
"Est-ce que "L'information, c'est le pouvoir" est toujours d'actualité ?
Bonne question..."
Oui, l'information (ou le savoir) est présenté comme une forme du pouvoir. Même si, aujourd'hui, on peut avoir l'information, le savoir, et pas le pouvoir. (Exemple: on sait qu'on nous ment sur l'Irak, on a l'iformation, mais ça ne change rien. Cynisme du pouvoir).
Eric: "Il n'y a que le taulier qui a le droit de faire des tests sur son blog! Attention: rétablissons un peu de verticalité!" - Tu as bien raison, le blog c'est la verticalité a portée de tous!
Sinon, un grand merci d'avoir exhumé les premières bordées de mon carnet. C'est toujours un plaisir de voir que les anciens billets ne sont pas condamnés à être enfouis et effacés - Et c'est d'ailleurs une grande lacune du Web actuel que de promouvoir systématiquement le contenu le dernier né
@Cratyle,
Oui, il faudrait rajouter une fonction Digg sur les blogs, pour promouvoir les contenus les plus populaires.
Avant, j'avais un "best of" (je devrais le remettre). C'est indispensable pour ceux qui découvre ton blog.
Plus passionnant encore serait peut-être un moyen d'organiser des parcours entre ses propres posts, entre ses posts et les commentaires intéressants... de raconter des histoires avec le matériau déjà présent dans le blog... et pourquoi pas le matériau présent hors du blog?
@Cratyle,
Oui, avec un blog thématique bien ciblé, c'est ce qu'il faudrait faire, écrire des billets pour mobiliser les anciens. Ce qui demande d'avoir un projet bien défini au préalable, penser le blog comme un livre (et non comme un journal).