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  • Chloé Delaume: conseils pour être publié

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    Cholé Delaume, romancière mais pas chiante, donne neuf conseils aux romanciers en quête d'éditeur. J'en retiendrai deux.

    Le premier est très sympa: "Si votre manuscrit entre dans la catégorie littérature expérimentale, et uniquement dans ce cas, vous pouvez m'envoyer votre texte, via la page contact, pour que je vous donne un coup de main".

    Le deuxième est judicieux: "Votre manuscrit sera observé dans l'ordre suivant : début et fin, puis pages pris au hasard au milieu. C'est seulement après avoir passé ce test qu'il sera éventuellement lu en intégralité".

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    Extrait d'une interview sur Fluctuat:

    Flu : Pourquoi écris-tu, et pour qui ?

    Chloe Delaume : L'écriture comme la lecture font partie des rares activités qui me paraissent concrètes et auxquelles j'accorde de l'intérêt. Ecrire est probablement le seul moyen que j'ai trouvé pour agir sur quelque chose, de manière ludique : toucher physiquement à la langue, la manier voire la manipuler. Je n'écris pas pour quelqu'un, la question de la réception du texte ne se pose pas pendant la phase d'écriture.

    Flu : Comment qualifier tes récits ? Romans, prose poétique ? Est ce que cela t'énerve si on parle d'autofiction ?

    C.D. : Je pense qu'on peut appeler ça du roman expérimental, même si le terme peut paraître ronflant ou suranné. Il y a bien une trame romanesque mais dans sa forme et son agencement je fais des tentatives de laboratoire. Il ne s'agit pas pour moi d'imposer quelque style que ce soit, ce sont des propositions. De même la notion d'autofiction est indéniable mais ce n'est pas le contenu du récit qui importe, c'est la manière dont il est rapporté. La ré-appropriation de l'expérience par le verbe et l'expérimentation parallèle du verbe.

    Flu : Le jeu avec les analogies entre sons et/ou sens est très présent dans tes écrits, est-ce que cela résulte d'une écriture automatique ou d'un gros travail de réécriture ?

    C.D. : Ni l'un ni l'autre. En fait je m'impose des contraintes en amont, comme dans les ateliers de l'OULIPO. Je prends des mots précis, des extraits d'hypotextes, parfois des bouts de chansons qui sont venus à moi en feuilletant des livres, en me promenant dans le dictionnaire ou en écoutant les disques qui tournent pendant que je travaille. Ces cuts peuvent être insérés dans le passage en cours, mais le plus souvent, comme il n'y a pas de hasard, ils deviennent la structure même de la page ou du paragraphe en question. Il y a un tas de "motifs dans le tapis", qui se déclinent de manière presque autonome. La phase la plus excitante de l'écriture réside dans ce moment-là. Il ne peut pas s'en suivre une réécriture laborieuse, ce n'est pas compatible avec la démarche initiale.

    Flu : Penses-tu que le lecteur comprend tout dans tes livres ? Est-ce que d'après toi la compréhension totale est nécessaire pour les apprécier ?

    C.D. : Compte tenu des détournements de référents utilisés, le lecteur ne peut effectivement pas tout voir, mais ça ne l'empêche pas d'entendre. Je suis parfaitement consciente qu'on peut taxer mon travail de précieux ou d'hermétique, que pour rentrer dans le texte une certaine attention est nécessaire, ce qui rebute souvent. Surtout que mon travail ne s'inscrit pas vraiment dans les courants à la mode, où comme le disait un magazine dont je tairais le nom par mansuétude "l'important n'est pas de bien écrire". En m'attachant au verbe davantage qu'à l'histoire je sais très bien que je ne peux être suivie par une grande partie du lectorat. Si c'est leur credo, c'est plutôt rassurant de ne pas leur convenir. La lecture constitue elle aussi une expérience en soi : la reconstruction du sens passe par une errance première et un apprivoisement progressif. En tant que lectrice j'aime beaucoup chercher les clefs de lecture. Ça a un côté Castors Juniors.

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