La semaine dernière, je me promenais sur les quais de Seine. J’aime flâner chez les bouquinistes. J’ai acheté deux romans de Simenon. Deux Maigret.
Simenon est le maître. Pour définir son style, trois mots me viennent à l’esprit.
D’abord, il est simple. Pas de fioritures chez lui. S’il pleut, il écrit « Il pleut. » Voire « Il pleut ! », suggérant le rythme de la pluie au moyen du point d’exclamation.
Son style est concret. C’est sa force. Simenon n’est pas un théoricien. Il ne manie pas les idées. Il fait voir, humer, toucher les choses. Il nous fait ressentir ce qu'éprouvent les personnages.
Son style est neutre. Pas d’emphase chez lui. L’atmosphère est souvent feutrée. On tue, mais sans déclamer. De plus, Simenon raconte la vie de gens ordinaires. Mais il les prend au moment où leur vie bascule. Par exemple, dans l’Homme qui regardait passer les trains, le personnage principal se dit qu’il a toujours obéit aux autres, il veut s’émanciper. Et c’est là que les ennuis commencent.
Gide: "Le plus grand"
Simenon a écrit des centaines de romans. Il en a vendu des millions. Et il est admiré des grands écrivains. « Je ne pensais pas qu’il était possible d’être à la fois aussi populaire et aussi bon » dit Henry Miller.
Quant à André Gide : « Il est le plus grand de tous… le plus vraiment romancier que nous ayons eu en littérature. »
Pour John Le Carré, c’est le « maître des profondeurs, Simenon avait un style d’une grande simplicité. C’était un écrivain aussi à l’aise avec la réalité qu’avec la fiction, avec la passion qu’avec la raison. Par-dessus tout, il inspirait cette confiance que les lecteurs réservent aux romanciers qu’ils vénèrent. »
(Photo: http://membres.lycos.fr/gomgut/Gomgut.htm)
Voir le site: http://www.lesbouquinistes.org/
Commentaires
J'ai rien lu de Simenon. Sauf un. Je le regrette. MAis il n'est pas trop tard.
Le problème de Simenon, c'est Jean Richard. Et Bruno Cremer. Et Jean Gabin.
Avec ou sans talent (moi les acteurs, j'aime que les actrices), tous ces gens et leurs images qui parlent sont du pipi de chat à côté d'un livre (de poche, j'aime les livres de poche). Pipi de chat n'est pas du tout la bonne expression. Mais je refuse de corriger en effaçant. Le pipi de chat sent très mauvais, j'en sais quelque chose, vue ma ménagerie incontinente). Pas les (télé)films. Ils sont juste plats. En 1 D, tiens, comme la politique.
Eric, yé souis vraiment désolé de mettre un article de blog en commentaire d'un des tiens, mais j'ai la flemme de découper un tableau.
" S’il pleut, il écrit « Il pleut. » Voire « Il pleut ! » "
Filaplomb aurait écrit "Il pleut !!!"
;-) si je puis me permettre.
Nicolas,
Et à Brest, il pleut pas?
Franssoit,
L'avantage d'un Simenon, c'est que c'est comme un roman de gare mais qu'on peut le lire hors du train!
Je ne sais pas... Pas de voyage cette semaine !
Alors, moins connu mais encore meilleur, Siemon a écrit quelques roman un peu différents, très très bons... à lire ! (désolé, mais je ne me souviens pas des titres, je crois qu'il y en a environ 5 ou 6)
bertranD,
L'Ainé des Ferchaux,
L'Homme qui regardait passer les trains,
Lettre à mon juge
Mais il y en a tant!
non non non d'autres... je crois... arf, je suis trop loin de ma bibliothèque... arf.... je sais plus... rire... un doute m'étreint...
>Nicolas : c'est juste qu'à Toulouse, quand il pleut, il pleut vraiment !!!
>Eric : Tu as mille fois raisons. J'avais commencé par Monsieur Hire, à cause du film avec Michel Blanc. Tiens ça répond un peu à Franssoit aussi, du coup. Eh Franssoit, y'a Monsieur Hire, quand même ! Il est épais celui-là !!!
(bonn sujet Simenon).
Après Houellebecq, Simenon, décidément! Que de points communs malgré mon libéralisme débridé ;)
Immense écrivain. Période trouble entre 40 et 45, pour ne pas dire collabo et légèrement antisémite, ce qui se retrouve dans certaines petites phrases de Maigret, dans les romans d'avant guerre. Fascination pour la grande bourgeoisie. Complexé à cet égard. Homme à femmes. Ayants-droits aujourd'hui âpres au gain.
La multitude d'adaptations TV et Ciné ont fait beaucoup de tort à ses romans, considérés a priori comme ringards (ben à cause de Jean Richard, Cremer, etc. justement)
Je n'aime pas l'homme, mais sa littérature me fascine, l'humanité de sa littérature me fascine.
Maigret, qui a toujours voulu être médecin, se présente comme un "soigneur d'âmes" et cherche à savoir quelle était la souffrance de l'homme avant qu'elle ne fasse de lui un meurtrier. Une obsession à vouloir comprendre la fraction de seconde qui précède le passage à l'acte.
Mes Maigret préférés: "Maigret et la grande perche", "Maigret et le corps sans tête" et puis pour le plaisir de ce personnage secondaire "Maigret et l'inspecteur Malgracieux".
Pour BertranD: "Trois chambres à Manhattan".
Merci pour cet article, Eric, que je ne découvre qu'aujourd'hui.
Un jour je m'achèterai l'intégrale chez les bouquinistes, sauf si je trouve avant celle de la Comédie Humaine...
@Sacha,
"Je n'aime pas l'homme, mais sa littérature me fascine, l'humanité de sa littérature me fascine."
Oui, et personnellement c'est son écriture en particulier qui me fascine. J'ai un peu lu ce que Roland Barthes écrivait sur "l'écriture blanche", une écriture du neutre qu'on peut voir à l'oeuvre notamment dans l'étranger de Camus. Chez Simenon, cette écriture se déploie avec force.
Le neutre est a priori un terme dépréciatif, chez Simenon, c'est le contraire. Il permet de donner libre cour à l'action et aux passions.