A force de se faire truander par les médias, les étudiants qui manifestent ont mis au point des méthodes pour contourner la propagande anti-grève.
Propagande: le mot est dur. Mais il est juste. Si vous avez vu, cette semaine, des reportage télé pro-grévistes (que ce soit chez les cheminots ou les étudiants), signalez-les moi!
Bref, pour déjouer le jeu médiatique, les étudiants ont inventé un procédé amusant. C'est Le Monde qui raconte ça:
"Ils s'appellent tous "Robert" ou "Martine" : les étudiants grévistes de l'université Montpellier-II ont adopté cette convention pour ceux d'entre eux qui s'adressent à la presse. Ils n'en démordront pas. "C'est pour éviter que certains deviennent les chouchous des médias", explique une "Martine", étudiante en troisième année de licence de physique-chimie."
Le journaliste du Monde est dérouté face aux armées de Robert et Martine...
Ailleurs, sur les blogs, la propagande d'Etat médiatique inspire le dégoût.
Bernard Langlois, dans Politis, résume très bien le problème:
"La façon dont la presse en général et les radios et télés en particulier rendent compte des conflits sociaux en cours suffit à expliquer pourquoi le fossé ne cesse de se creuser entre la profession de journaliste et une fraction grandissante du public. Il ne faut donc pas s’étonner que les reporters subissent de plus en plus souvent un accueil hostile, notamment dans les situations tendues comme sur les campus en ce moment ; ni que de plus en plus de gens délaissent télé-aux-ordres ou presse-qui-ment, et cherchent leur bonheur sur le Net."
Commentaires
Ce n'est pas en se défiant des médias qu'ils gagneront l'opinion publique à leure cause. Le sectarisme n'a jamais rien apporté de bon.
@Kanard,
Tu as sans doute raison! Mais tristement raison: aujourd'hui, il faut absolument être people... sinon, pas d'accès aux médias. Mais ç quoi ça sert de causer dans le poste si on est obligé d'y dire des conneries ou des banalités (en moins de trente secondes)?
@Eric
Je ne suis pas vraiment d'accord. La meilleure preuve, c'est certainement tous les micros trottoir qui se multiplient, notamment pour exprimer l'exaspérations des utilisateurs de transports en commun.
Si en face les étudiants refusent l'exposition médiatique, il n'y a pas de contrepoids. Bref, ils sont pris à leur propre jeu.
@Kanard,
Tu as sans doute raison!
Mais, tu le dis toi-même, les micro-trottoirs anti-grève se multiplient, preuve que le traitement de la grève par les médias est vraiment partial. Donc, il est possible que certains étudiants aient choisi de riposter d'une façon ou d'une autre.
Drôle de jeu que celui des médias!
Ah j'ai vu sur France3, dans un reportage sur les grèves étudiantes, il y a quelques jours, un gamin commecer à répondre au question du journaliste et de suite se faire remettre dans le défilés par d'autres étudiants qui défilaient. Ils rappelaient en même temps la consigne : on ne parle pas à la presse !
En tout cas, ils ont bien compris comment fonctionne la société du spectacle permanent (salut Deleuze !) et cherchent à la contourner.
Très intéressant !
Tout aussi intéressant le désarroi des journalistes qui, se croyant sincèrement sincères, ne comprennent rin à l'histoire !
:-)
Je suis certes très loin du conflit, mais je comprends très bien le malaise que laisse les média peu sympathique à la cause étudiante.
D'ailleurs, l'idée est bonne les "Martine" et les "Robert" de ce monde auront peut-être un écho cet hiver au Québec, qui sait...
Et pour ajouter au sujet, lundi dernier, un caméraman est venu nous demander en AG (ass.générale) s'il pouvait prendre des images pour son émission...
réaction : noway ! c'est un fumier qui méprise les étudiants (évidement, ça n'a pas été dit comme ça explicitement)
Un océan nous sépare et pourquoi, les mêmes questions sur le rôle des média ? ... et bien...
Je ne regarde pas les chaines généralistes pour l'information, donc difficile de donner des exemples de reportages pro ou anti. Sachant que quand je regarde ou que je lis l'information, ce n'est pas un message pro ou anti quelque chose que je veux entendre, mais un message objectif.
je n'ai pas été touché par les greves parce qu'habitant en Province, donc je n'ai lu et entendu que les rentrascriptions des médias et d'Internet.
Quelque chose me dérange dans ton billet Eric, c'est que tu parles ouvertement de traitement "pour" et "anti". Alors que pour moi, l'idée que je me fais d'une information objective est qu'elle ne prend pas de position.
Mettre sur le seul item médiathique le fait d'une impopularité de la greve, pourquoi pas. Maintenant, j'ai vu quelques débats sur les chaines satellites, dont un sur ITV (je crois) où un représentant des grévistes "durs" syndicalistes était sur le plateau. J'avoue que je n'ai pas eu besoin des médias pour le trouver "impopulaire", avec un message que j'ai jugé (subjectivement) caricatural, sectaire, et mélangeant tous les problemes pour donner un message politique et non syndical.
Ne s'agit pas d'être "people" mais plutot convaincant dans la défense de ses idées et de son combat. Et je ne sais pas si vraiment les médias sont les seuls responsables de "l'impopularité" de ce mouvement. Peut être que ceux qui le font, et les thèmes qui sont mis en avant, sont aussi responsables pour que ce mouvement soit populaire ou impopulaire.
C'est pourquoi je trouve ton billet peut être un peu fort. "Propagande" me parait être un mot aussi fort et peut être inutilement aproprié que celui d'"otage", qui avait fait parler sur la toile.
Pour ma part, j'attends modestement des médias objectifs, et ne prenant pas forcément position pour ou contre.
Et en tous cas, ton billet va à ravir avec le titre de ton blog : "crise des médias" ^__^
Bon weekend à toi et tes copains de blogs
@Falconhill,
Oui, comme je le dis, le mot "propagande" est dur. Mais je l'emploie, car ça me paraît justifié.
Tu parles d'objectivité. Mais l'objectivité n'existe pas en journalisme. Il n'y a pas de point de vue objectif! Tout ce que peut faire un journaliste, c'est faire entendre tous les points de vue.
Et, d'une certaine façon, tout le monde s'est exprimé dans les médias: le gouvernment, les grévistes, les "usagers pris en otage", etc. Mais la façon dont sont présentés les reportages est partiale.
Personnellement, je n'ai pas de sympathie particulière pour les cheminots grévistes, j'avoue même que je n'ai pas trop suivi cette affaire!
@Filaplomb, Natacha,
Oui, il semble que, finalement, les étudiants se tirent une balle dans le pied en agissant comme ça.
Eric : tu as totalement raison. Peut être moins sur le mot propagande, car je crois que les mots ont un sens et je pense que c'est trés trés trés excessif.
Mais sur le reste de ton discours, c'est difficile de ne pas être d'accord. Sur une certaine partialité, elle est différente selon que l'on soit sur TF1, la 2, Canal, ITélé, le Figaro, Libération ou Rue89. C'est vrai.
Je persiste à penser que dans ce genre de billet, le titre de ton blog prend toute sa saveur.
Bon weekend à tous
La façon dont la presse a traité les grèves de toutes les categories est à vomir, surtout les TVs. Le seul canal sérieux reste France Culture, même si un peu bavard, Ali Badou fait bien son boulot. Et quand j'entend le pauvre Brochand ce matin sur le meême FC, cet ancien pubeux faussement modeste, je me révolte mais c'est de l'info mais merci FC quand même
Le paradoxe est que le mouvemenet n'existe pas sans médiatisation, puisque si les français n'en entendent parler, le gouvernement peut aller jusqu'à les laisser rater leurs exams de janvier pour les remettre dans le droit chemin... Pourquoi le Petit Harangueur place-t-il ses pions ds les médias si ce n'est pour ça ? Ce sont donc les médias alternatifs qui doivent jouer le rôle des colporteurs pendant la Révolution... avec les risques que cela comporte...
Le paradoxe est que le mouvemenet n'existe pas sans médiatisation, puisque si les français n'en entendent parler, le gouvernement peut aller jusqu'à les laisser rater leurs exams de janvier pour les remettre dans le droit chemin... Pourquoi le Petit Harangueur place-t-il ses pions ds les médias si ce n'est pour ça ? Ce sont donc les médias alternatifs qui doivent jouer le rôle des colporteurs pendant la Révolution... avec les risques que cela comporte...
des Martine et des Robert, l'idée est excellente!
il faut faire confiance aux jeunes, aux étudiants; ils sont décidés et ils ont de l'humour
@nea,
C'est moins un paradoxe qu'une contrainte. Les partis politiques, les syndicats, les activistes doivent tenir compte de cette contrainte: les médias sont puissants, et, globalement, ils sont aux mains de la droite (même si les journalistes, eux, sont majoritairement de gauche: mais que peut un pigiste?).
@Didier,
Oui, à vomir... et c'est pour ça que je n'ai pas trop regardé... J'ai suivi quelques journaux de France 2. Pas trop d'excès sur cette chaîne...
Un article essentiel. Merci, Eric.
Trop de journalistes ne sont pas des interlocuteurs corrects, dignes, honorables. Ils viennent sur le lieu des grèves, sur les campus, pour trouver des situations, enregistrer des propos, qui vont coller avec des perspectives traçées à l'avance. Et, qu'ils soient de TF1, France 2, Canal Plus, RTL ou pire, Europe 1 (comment ont-ils fait pour faire pire ?), il s'agit pour eux d'exercer CONTINUELLEMENT ce travail de propagande sur des bases idéologiques auxquels ils adhèrent consciemment ou inconsciemment; sans parler que ce sont aussi bien souvent des agents des RG. Devenir des ennemis évidents de la majorité des citoyens, ce sont eux qu'ils l'ont choisi. Certains l'assument en chantant, en provoquant, d'autres ne l'assument pas du tout. On peut encore discuter avec cela, mais discuter sur des bases claires : "nous savons que, la plupart du temps, vous mentez, trompez, ...". Peut-être faut-il leur faire signer un document dans lequel ils s'engagent à "dire la vérité" ? Un contrat civique d'engagements mutuels ? ! En tout cas, j'approuve et j'applaudis ces étudiants qui se font respecter par ces journalistes qui, lorsque vous les connaissez un peu en privé, ne respectent personne, sauf les puissants. Il est surtout temps que des médias civiques et des médias de gauche se mettent en place, vite.
Les médias font partie du problème. Ils sont partie prenante des mouvements de contestation qu'ils tentent de discréditer.
Ce n'est pas sur info-Sarkozy, ni sur info-Bolloré, ni sur info-Lagardère ni sur info-Arnault ni sur info-Pinault ni sur info-Rotschild, etc... qu'il faut compter pour avoir un avis neutre. Les médias se réclament d'un avis neutre, mais de fait il sont engagés.
Comme le disait très bien un article paru sur Acrimed en octobre dernier, il faut "se servir des médias sans leur être asservis" :
http://www.acrimed.org/article2741.html
Je vois deux choses :
- il faut soutenir (très très fort !) toutes les initiatives qui visent à promouvoir l'indépendance des médias ( http://souk-fares.blogspot.com/2007/10/debout-pour-le-journalisme-une-loi-pour.html ).
- développer les médias alternatifs, comme les blogs (ici je prèche des convertis, mais nous avons tous des familles et des amis qui continuent à boire la soupe médiatique indigeste qu'on nous sert quotidiennement) et les médias collaboratifs ( http://souk-fares.blogspot.com/2007/05/agoravox-3-bonnes-raisons-daccorder-une.html ).
@Fares,
Merci pour tous ces liens.
J'ajouterai que dans le système médiatique, un acteur occupe une place non négligeable: le spectateur (lecteur, auditeur). C'est lui, au final, qui veut des médias tels qu'ils sont!
@Grellety,
"Il est surtout temps que des médias civiques et des médias de gauche se mettent en place, vite."
Oui, ça manque un peu...
http://cratyle.net/2007/11/21/des-constructions-mediatiques-des-interpretations-et-des-faits/
http://www.liberation.fr/actualite/ecrans/291977.FR.php
Etant donné ce qu'a fait TF1 (la liste est si longue, mais, par exemple, rappelons comment en 2002, ils ont abusé les Français en leur faisant croire, trois mois avant l'élection présidentielle, que notre pays s'était transformé en Far-West, et ce pour mieux favoriser un certain Jean-Marie, avec lequel les patrons de TF1 ont eu des repas réguliers), il me semble que l'une des prochaines perspectives pour les citoyens engagés comme nous le sommes, c'est de préparer une manifestation contre cette chaîne, à Boulogne-Billancourt.
@gretelly,
L'idée est intéressante!
Nouvel article du Monde. La fin:
MÉFIANCE VIS-À-VIS DES MÉDIAS
La quatrième coordination nationale étudiante contre la loi sur l'autonomie des universités s'est ouverte samedi après-midi à l'université de Lille I (Sciences et technologies), en présence de quelque 300 délégués étudiants de toute la France. Les étudiants, venus de 67 universités et IUT, doivent débattre pendant deux jours pour définir leurs revendications. Mais cette quatrième édition s'ouvrait dans un contexte particulier. En effet, la coordination a toujours réclamé une abrogation de la loi Pécresse, en estimant cette demande "non négociable". Mais l'Unef, qui ne réclame pas le retrait du texte, avait jugé jeudi "un retour à la normale envisageable" dans les universités si le gouvernement ouvre des discussions et offre des "réponses satisfaisantes".
Comme lors des précédentes coordinations, la méfiance vis-à-vis des médias était très forte, des étudiants se montrant même parfois agressifs verbalement. Les journalistes étaient invités à rester dans une salle, rebaptisée par certains jeunes salle de "quarantaine". Après quatre heures d'attente sans pouvoir dialoguer avec des membres de la coordination, plusieurs médias ont décidé de ne pas la couvrir. "L'Unef refuse de cautionner cette ambiance très tendue et très violente à la fois vis-à-vis des délégations des étudiants et de la presse", a affirmé la porte-parole. Elle a précisé que les délégations jugées "litigieuses" ou "fausses" étaient rassemblées dans une salle où était inscrit sur le tableau noir "Bienvenue au goulag".
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3224,36-982310@51-972969,0.html
Se méfier des médias, peur du vedettariat, ils sont bien ces petits...
Enfin ces jeunes, car les petits....
Ils sont surtout en apprentissage... Niveau communication c'est un bordel pas coyable, notamment avec le départ de l'UNEF, puis son rappel à la fin du week-end.
avant d'attendre de l'objectivité de la part des médias (chose impossible mais un juste équilibre entre pro- et anti serait quand meme déjà qq chose) , il faudrait déjà lors de tels conflits que les médias fassent leur boulot
c'est à dire qu'au lieu de nous donner des images des manifs, les chiffres des syndicats et ceux du gvts , qui sont tjs les memes, de manifs en manifs avec tjs d'aussi grands écarts, et de répéter à l'envi des platitudes,de tendre des micros aux antis et aux pro (qui ne nous apporte absolument RIEN) ils pourraient plutôt nous informer sur les tenants et aboutissants des conflits, en profiter pour nous expliquer, pour faire des recherches sur le fond des problèmes, mettre le zoom sur les point des réformes qui fâchent, les expliciter, rapporter les propositions des étudiants au lieu de rester à la superficialité des choses, et ceci est vrai pour tout conflit
je n'attends pas des médias qu'ils soient plus ou moins pro ou anti, si le gvt était de gauche je n'aimerais pas qu'il ne donne pas non plus l'image de la réalité de l'opposition...
j'attends de l'opposition par contre qu'elle se manisfeste, au moins !! sinon comment volez-vous qu'elle soit audible ? parce que non, une simple manif ne suffit pas, si elle n'est pas relayée
moi je pose cette question : si des leaders de la gauche - des gauches- avaient demandé de venir s'exprimer au 20.00, aux JT , aux journaux des radios, s'ils avaient envoyé des lettres ouvertes ou des articles à la presse écrite, cela aurait-il été refusé ??
parce que dans le cas où leur présence aurait refusée dans les divers médias, n'auraient-ils pas pu - et même du- porter plainte devant le CSA , qui devrait faire respecter la parité de la parole politique ?
n'est ce pas plutot la totale absence et le silence parfait de la gauche qui structurent cette vitrine médiatique anti- grève ? l'opposition sur le terrain, partout , aurait été visible à l'image et au micro non ?
n'est-ce pas là, l'ominiprésence de l'opposition ,le rempart contre la propagande ?
Je crois surtout que ceux qui interdisent les AG aux journalistes ne lisent pas les journaux. Ils regardent TF1, et généralisent. Personnellement, dans mon petit journal de province, on rend compte objectivement des faits (c'est-à-dire, comme tu l'as si bien dit chez Cratyle, que l'on développe avec égalité tous les points de vue). Et pourtant, on se fait virer de ces AG qui n'ont de démocratiques que le nom. Dans les manifs, nombre d'étudiants ne veulent pas nous adresser la parole. Idéologie, quand tu nous tiens... Et généralisaitons, surtout!
http://www.acrimed.org/article2774.html