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TF1 était là et nous avons parlé de Gandhi… Pour comprendre la décroissance, j’ai voulu rencontrer des gens qui pratiquent de ce mode de vie. Les décroisseurs berrichons m’ont reçu chez eux. C’était pendant le Forum des organisations environnementales, à Bourges, du 5 au 8 octobre.
Je n'ai pas précisé que Serge Lepeltier, maire UMP de Bourges, a été ministre de l'écologie du gouvernement Raffarin. Ce qui explique qu'il organise des manifestations écolos dans sa ville. Belle ville, d'ailleurs.
Yannick Bedin, est conseiller municipal à Bourges. Il appartient au Parti coommuniste français. Voici ce qu'il dit du festival:
"Simple posture électoraliste ou engagement sincère, la vocation écolo
du Maire de Bourges ne dépasse pas le cadre de la simple défense de l'environnement, sans aucune remise en cause des règles de l'économie libérale et du chaos social planétaire qu'elle entraîne, du pillage des pays du Sud, des multinationales qui spéculent et épuisent les ressources naturelles. Le filon écolo a tout de même ses limites qu'un homme de droite ne saurait franchir."
Sponsors en tous genres
Quant à moi, j'ai assisté à une partie du Festival du film écologique. Nous sommes allés à une soirée, Magali, Hercule, Florent, les décroisseurs et moi.
Nous avons été surpris de voir plusieurs petits films réalisés par TF1. Le logo était bien visible. Les films, deux minutes chacun, traitaient de produits écologiques. Ils ressemblaient à de la pub déguisée.
De plus, TF1 était très bien représenté dans le jury du festival. J’ai assisté à un débat. Il était animé par un journaliste de TF1. Un des intervenants était réalisateur d’Ushuaïa. Et dans la salle il y avait Jacques Pradel. Il n’est plus à TF1 mais j’ai été très content de revoir. On l'avait « perdu de vue »...
Mais il n’y avait pas que TF1. Entre deux films, les logos d’une vingtaine de sponsors s’affichaient sur l’écran. Pendant le forum, réparti entre neuf bâtiments (hall, salle de conférence, médiathèque, musée…), les partenaires avaient droit à deux bâtiments. Il y avait un marché couvert vendant les produits de deux grandes surfaces. Un bâtiment réunissait une banque, un fournisseur d’eau, trois groupes de grande distribution et un constructeur automobile. Et tous ces sponsors ont joué à fond la carte de l’ « exigence écologique » et du « développement durable »…
Avec Olivier, un autre décroissant, nous avons discuté de l’aspect spirituel de la décroissance. C’est ce que certains nomment « simplicité volontaire ». Elle consiste à adopter un mode de vie moins dépendant de l'argent qui vise à satisfaire ses vrais besoins.
Plus généralement, Olivier parle d’une « attitude générale dans la vie ». Il m’a cité l’exemple de Gandhi. Il a évoqué la communauté de l’Arche comme un exemple assez marquant.
Il est de formation scientifique. Je lui ai demandé pourquoi les hommes politiques semblent si peu se soucier de l’écologie. « C’est en raison de leur formation. Ils ne sont pas formés à ça. Par exemple, un Chirac, n’a découvert l’écologie que sur le tard. Et c’est contraire à ses schémas de pensée. »
Selon lui « les grandes écoles forment quelques personnalités originales, pas beaucoup. Le message écologique a du mal à passer, également au niveau des médias. Par exemple, Jean-Marc Jancovici a répondu à une interview sur une grande chaîne de télé. On lui a demandé ce qu’il fallait faire pour réduire les émissions de gaz. Il a répondu qu’il fallait acheter des voitures plus petites. Levée de bouclier immédiate. La journaliste lui a fait comprendre que les trois principaux annonceurs de la chaîne étaient des constructeurs automobiles. »
Voilà, les choses sont assez simples. Certains parlent même de complot. Mais Olivier est hostile aux théories du complot. « Je lis beaucoup de choses sur Internet, liées à des théories du complot. Et j’en retirer toujours une impression désagréable. Mon sentiment est que ceux qui écrivent ces textes ne font que s’auto-intoxiquer, même s’ils le font pour lutter contre ce qu’ils estiment être des adversaires. Au fond, ces critiques sont très néfastes. On finit par tourner en rond. Je préfère lire des textes plus clairs, des textes qui apportent de la joie. C’est aussi cela la décroissance : cela ne concerne pas seulement ce que l’on mange, la façon dont on s’habille et se déplace, mais aussi les nourritures intellectuelles. »
Le Forum des organisations intergouvernementales réunissait des dizaines d’associations, dont les Faucheurs volontaires, la Confédération paysanne et Greenpeace. José Bové était programmé. Las, l’homme à la pipe s’est envolé en dernière minute pour le Mali…
J’ai rencontré un représentant de l’association Kokopelli. Ainsi qu’une une association de coopération avec une école du Bangladesh. Intéressant aussi, l'initiative Freecycle...
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Commentaires
"Mais il n’y avait pas que TF1. Entre deux films, les logos d’une vingtaine de sponsors s’affichaient sur l’écran." Total ? Sanofi ? Renault ?
"Las, l’homme à la pipe s’est envolé en dernière minute pour le Mali…" Parmi les sponsors possibles j'avais oublié Air France.
@Nicolas,
"Parmi les sponsors possibles j'avais oublié Air France."
C'est une blague classique: avec tout le kérosène dépensé par José Bové, combien de CO2 en plus, d'arbres qui meurent?
Les sponsors, je ne vais pas les énumérer ni leur faire de la pub.
C'est toute la complexité de la lutte écologique. On ne peut pas vivre hors du monde. Mais le "système" vous récupère sans cesse...
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Cela dit, après la conversation intéressante avec Olivier, je suis convaincu de la nécessité de ne pas parler de système, de complot. C'est en soi-même qu'on doit changer, pour après faire changer les choses autour de soi...
Vaste sujet que la décroissance, je pense que cette vision est irréalisable à grande échelle, et quelle est une réponse de pays riches. Il nous faut aborder le problème de l'écologie à travers le prisme des pays pauvres. Bien entendu la croissance entraine des effets dévastateurs mais en France jamais la forêt n'a été aussi importante et ce du fait que nous avons réussi à dévellopper de nouvelles technologies et du fait du pétrole (OK), mais je reste persuadé que les problèmes écologiques doivent être abordés de manière transversalle tant gauche que droite. Pour finir les politiques prennent conscience du fait environnemental, mais emploi et environnement ne font pas toujours bon ménage.
"vivre tous simplement pour que tous puissent simplement vivre" Gandhi
je l'ai probablement déjà écrit sur ton blog, (je radote un peu ces derniers temps) mais là, ça collait trop bien, si même mes berrichons préférés en parlent
céleste,
Tout simplement!
:)
Très riche cette visite à Bourges. J'ai senti comme une légère ironie à propos de Pradel, et lire qu'un fournisseur d'eau, un constructeur auto faisaient partie de la fête me consterne. En fait, tu dis "On ne peut pas vivre hors du monde. Mais le "système" vous récupère sans cesse...", or moi je pense qu'il faut changer le système.
Certes je n'ai pas la méthode. Mais je crois à çà. Et tu as sans doutre raison, quand tu dis qu'il faut d'abord changer à l'intérieur de soi pour changer le monde. Ca va loin l'écologie...
Par ailleurs, à propos de la formation des politiques, j'entendais Strauss Kahn l'autre jour au débat des trois, où il disait qu'il n'y avait point de salut hors la croissance. Bref, il reste dans le schema ancien, n'a rien compris à long terme ou alors il fait très bien semblant.
Phil,
"Par ailleurs, à propos de la formation des politiques, j'entendais Strauss Kahn l'autre jour au débat des trois, où il disait qu'il n'y avait point de salut hors la croissance. Bref, il reste dans le schema ancien, n'a rien compris à long terme ou alors il fait très bien semblant."
Oui, Strauss Kahn pratique l'incantation de la croissance. Il débute toutes ses phrases par ce mot. "Il faut retrouver lune croissance forte"...
C'est un fait important: aucun candidat à la présidentielle ne parlerade décroissance, puisqu'Yves Cochet a été battu chez les Verts.
Merci pour votre commentaire sur mon blog.
Ce qui me chagrinne avec les "décroissants", c'est que leur mode de vie ne peut être donné en exemple, tant il est par trop en rupture radicale avec le mode de vie occidental.
Comme chacun le sait, nous ne disposons qu'un peu moins de deux hectares par humain, et les Français en consomment 6 en moyenne... et personne en France ne descend sous les 2 hectares, dès lors que nous sommes insérés dans l'économie, à moins de renoncer à prendre le train, à envoyer ses mômes à l'école... et à se faire soigner.
Retrouver un équilibre ne se fera que globalement, par un changement global de mode de production mais qui fasse que nous vivions globalement mieux. Tel est le défi posé à l'écologie politique...
@Frank,
Oui, il y a une différence entre l'écologie politique et les petits gestes (ou pensées) qu'on fait individuellement. Mais les deux se rejoignent et ne devraient pas s'opposer. Si on attend un règlement global des problèmes, c'est comme si on espère la révolution... ça prend du temps et, par le passé ça n'a pas trop marché!