Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

La précarité rend mystique (ou l'inverse?) (1)

1723430648.jpg

Ce billet est le premier d'une série de trois. Il part d'une interrogation: que peut bien faire un travailleur précaire ou un chômeur de longue durée de son temps libre? Déprimer, gamberger, se saouler ou devenir mystique malgré lui? (le deuxième billet est ici)

Je n'ai pas assez étudié la question, mais il semblerait que les mutations techniques nous conduisent vers une réduction du temps de travail. Ou tout du moins, une discontinuité du temps de travail. En clair, la précarité pour certains (par pour tous, rassurez-vous!) Lisez André Gorz, cet auteur qui a théorisé notamment la sortie du salariat.

Ce temps de travail discontinu, avec des périodes de chômage, de formation, des reconversions professionnelles, peuvent être éminemment fructueux. L'individu et son développement est au centre du travail. toutes ses capacités sont requises par un monde du travail qui exige toujours plus des individus.

Sans aller jusqu'à parler de mystique (le mot est trop fort), on peut toutefois affirmer que le travail sur soi, le développement de la personnalité, sont des clés de la réussite professionnelle. Les entreprises exigent des travailleurs, en plus de savoir faire et de compétences, un savoir être efficace.

Par conséquent, la psychologie, le développement de soi, sont devenus des préoccupations incontournables.

Et la mystique dans tout ça? Poussé à son extrême, la recherche de soi conduit à la mystique. Vous avez sans doute dans votre entourage un étudiant monté en graine qui passe son temps dans sa salle de bain? Sans parler de ceux qui vivent devant leur écran d'ordinateur. Platon et Nietzsche sont des voies choisies par d'autres. Les temps de chômage se meublent comme on peut: atteindre l'extase mystique est une façon de passer le temps...

A se demander si la précarité ne pousse pas vers la philosophie. L'étudiant attardé, devenu chercheur d'un emploi toujours plus diaphane, se lance à la poursuite du graal spirituel. Les guichets de l'ANPE ouvrent sur la caverne de platon.

(billet republié sur équilibre précaire)

Commentaires

  • Perso, ça m'a poussé tout droit dans le militantisme!

  • surfer sur internet ? ou piquer les sacs aux vieilles dames ?

  • @Le Monolecte,

    Oui, tu allies l'action et la réflexion, parce que tu as trouvé un débouché positif à ton "étonnement" face au monde et à ton indignation face aux injustices.
    Le mysticisme (et tout les quiétismes) a toujours été une façon de s'accommoder des situations politiques les moins acceptables. Au contraire du militantisme, qui cherche à faire évoluer les choses, pas seulement à les accepter.

  • Moi ça me permet de faire tout ce que tu annonce dans ton billet (a part la salle de bain) et de militer via mon blog. Etrangement, ça m'a permis de mieux me connaître, de finir une analyse et d'apprécier parfois le simple fait d'être zen sans contrainte immédiates.
    Les contraintes matérielles et financières sont hélas là pour rappeler qu'il faut travailler et au final on finit par "accepter" la précarité.

  • Travailleur indépendant, je vis aussi la précarité ! J'attends les deux autres notes pour commenter

  • Chouette billet. Rien à rajouter. Bonne journée

  • relativiser, c'est à dire faire le tri entre l'indispensable et le futile.

    ensuite je me suis demandée si je pouvais se passer totalement du futile, dans mon cas la réponse est négative, j'aime bien, de temps en temps faire plaisir aux autres et (ou) à moi même.
    donc j'essaie de travailler suffisamment pour remplir deux objectifs: pouvoir faire face aux dépenses vitales et avoir une petite marge de plaisir (culturel, musical, exotique...), confort, coquetterie...
    suffisamment, mais pas plus!

    le temps restant (quand il y en a) me permet de voyager, d'écrire, de lire, de réfléchir.
    en un mot, de rendre ma vie plus "riche", plus belle, plus intéressante

  • Ouf ! j'espère que c'est de l'humour...

  • J'ai très vite regretté le temps choisi à 4/5ème dans mes tous débuts professionnels : un temps que j'avais réussi pendant une trop courte période à préserver d'un salariat chronophage, mais que la réalité économique m'avait bien vite amené à sacrifier...

    Un temps retrouvé par la force des choses, mais qu'il 'est pas question d'occuper simplement mais plutôt auquel on donne ou conserve du sens, quel qu'il soit.

  • @Kesjendi,

    "Un temps retrouvé par la force des choses, mais qu'il 'est pas question d'occuper simplement mais plutôt auquel on donne ou conserve du sens, quel qu'il soit."

    Oui, la recherche du sens, c'est l'essentiel.


    @Dagrouik,


    Je crois que c'est ça, apprendre à vivre sur un autre rythme.


    @Didier Goux,

    Dehors!

    (je plaisante bien sûr)

    @Céleste,

    "ensuite je me suis demandée si je pouvais se passer totalement du futile, dans mon cas la réponse est négative"

    Tout dépend ce qu'on appelle le futile!

  • On ne dit pas "je plaisante", en français moderne, on dit "smi!ley ! smiley ! : prenez des notes, merde !

  • Ca me fait penser à la phrase controversée de Barack Obama... il disait ça d'une autre manière, mais il disait ça (la mystique étant ici la religion et le port d'arme).

  • Qu'entendez-vous précisément par précarité ?

    Instabilité ou "misère" ? Bien que le dernier soit faux, mais j'ai l'impression que politiquement on exploite le dernier...

    Bref. Ça dépend des personnalités et de facteurs culturels (tolérance de l'incertitude, cf. Hofstede). Certains savent mettre à profit cette instabilité (s'enrichir des différentes expériences, profitez des temps morts pour s'améliorer encore, etc.), d'autres paniquent et c'est le cercle vicieux. :s

  • ...quand la precarité ne prend pas trop la tête, pour empecher toute pensée , et maintenir plut^t l'individu dans un état d'anxiété permanente, , surun "qui vive" qui au contraire finit par porter atteinte au sentiment de soi, à la recherche d'un équqilibre intérieur, tant l'agression extérieure est ingérable...
    bref
    une oisiveté qui permette d'être protégée de tout cela permet peut être le mysticisme dans de rares cas...mais venez faire un tour au centre social avec moi en satge...et on en reparle après
    ;-))

  • @Docteur Peuplu,

    La précarité que j'évoque, c'est la précarité de l'emploi: l'absence de contrat à durée indéterminée.
    La précarité du travail, les mauvaises conditions de travail, c'est lié à cela, mais c'est autre chose.
    Enfin, la misère, c'est autre chose, c'est le stade au-dessus.

    La précarité de l'emploi, beaucoup de jeunes y sont confrontés. Presque tous, même.

    @Dominique,

    Mais je serais très intéressé de lire un témoignage de ta part. Ca m'intéresse.

  • Ah mais si la précarité laisse du temps libre qu'on utilise pour se former (y compris intellectuellement) pour améliorer son employabilité, ça devient vraiment terrible.
    J'ai toujours le sentiment qu'au contraire, la précarité est organisée (le NAIRU !) pour nous interdire de réfléchir et d'envisager la vie autrement...
    C'est une réflexion, pas une certitude !

    :-)

  • Je suis étonnée Eric, que depuis le temps que tu tiens ce blog incontournable, un quotidien ne t'ait pas encore demandé d'écrire ou développer pour lui...En attendant, on en profite ;-))

  • @eric
    Encore ces jours ci, toutes les familles que j'ai rencontré , qui ont leurs enfants suivis, placés à l'Aide Sociale à l'Enfance, ou en aide éducative, sont sans emploi, avec des soins non réalisés ( une femme n'a qu'une dent à samachoire supérieure, nombreux sont ceux qui présentent des signes d'hygiene défaillante, souvent très très défaillante, vêtements sales),leur logement est destructuré chez une grande partie d'entre eux: la disposition des meubles n'est plus celle d'une habitation investie,le menage n'est plus fait depuis longtemps, les animaux y ont fait leurs besoins,non nettoyés, au salon comme dans la chambre... ils reviennent souvent sur les mêmes sujets, comme une fixation...alcoolisme et dépendance médicamenteuse pour le tiers d'entre eux ...( merci les psychiatres et les benzodiazepine) voire plus...mais ils ne sont pas prets a modifier les choses comme ça, et souvent denient tout élément de réalité...
    Aucun de ceux que je connais dans mes suivis ne relève de ce que tu dis: cela, je l'ai connu avec une femme malade d'un cancer, en travaillant dans une MDPH....la chimio ne pourra pas la sauver, elle a développé un altruisme, une humilité devant la vie...mais...je crois aussi qu'elle s'est révélée un peu plus, ce qu'elle était déjà...c'est une artiste peintre...une sacré femme...
    Chez ceux dont la précarité d'emploi devient cette précarité du quotidien, quand tout s'en mèle, c'est une spirale, un univers qui ne vous lache pas comme ça.
    Ca fait honte aux enfants...c'est dur ça, honte de ses parents..( c'est pas que le truc de la bagniole pourrie au college, y'a pas que ça).
    Les cafards dans le linge, dans la nourriture, les placrds, partout, le bébé qu'on ne quitte pas des yeux, afin que les betes ne lui viennent pas dessus...
    L'humidité des immeubles defectueux: la condamnation des pieces de chaque étage du même côté, et un loyer qui est toujours le même, et pourtant, plus de salle de bains, de la moisissure, de la pourriture partout...la plupart des logements ou je vais n'ont plus de papiers peints, tout est arraché , tout est sale..tout est a revoir..et pourtant il leur faut vivre là...mais...de là à imaginer que le développement de soi...soit encore possible...faut un moral en beton...et l'idée que demain tout ira bien...

    L'urgence des factures, manger...

    bon, avce ça je vais lire la suite de tes articles ( et j'me demande encore comment les pauvres mecs de gauche de ma ville ( je pense a ceux qu'ont loupé la mairie de Mont de Marsan )qui pensent a droite ,mais ne le savent pas, peuvent se permettre de baver sur des gens qui comme moi bossent dedans tous les jours...venez...

  • juste pour rajouter un repere dans la précarité: les restos du coeur ont fermé..la semaine ne s'organise plus de la même manière...on ne vient plus en ville le même jour.. Et puis, la viande: c'est fini...car ce sont les seuls à fournir...les colis du secours catho ou d'ailleurs..c'est bien, mais c'est pas pareil...et puis, il faut payer un peu...oui, ca part d'un bon principe, celui qui pose qu'on a tous quelque chose..eh bien non...

  • je pense donc que lorsque la précarité est "choisie", c'est à dire, s'adapte à un idéal de vie, atteint ou non, alors, la créativité prend le pas, l'esprit peut s'ouvrir...mais pas si elle est subie, sans issue...

Les commentaires sont fermés.