Ma Chambre au Triangle d’or, de Pierre-Louis Basse, est une plongée dans le monde des friqués.
Le triangle d’or est ce quartier compris entre l’avenue des Champs Elysées, l’Avenue Montaigne et l’Avenue George V. Pierre-Louis Basse, auteur à succès de Ma ligne 13, connais mieux les quartiers métissés et populaires. Le triangle d’or, pour lui c’est l’étranger.
Il jette un regard désabusé sur notre société. « Les marchands ont gagné ». Et il l’exprime dans un style enlevé, parfois très crû. Voilà ce qu’il écrit page 38:
« Les marchands avaient fini par s’imposer. Nous risquions de connaître des difficultés. Le monde s’était creusé en de multiples niches. Il y avait des niches pour les Juifs ; quelques cases pour les Arabes ; d’autres encore pour les homosexuels. Ceux qui couchaient dehors, rue de Rivoli ; ceux qui préféraient s’allonger dans des cartons, gare d’Austerlitz, rêvant à de prochains voyages. Tous ceux qui s’ennuyaient ferme : ils n’avaient finalement rien d’autre à faire que d’acheter des dizaines de sac à main en crocodile, ou bien des montres chères, des chaussures, des visons, des filles, des voitures de luxe, afin, peut-être, de se distraire pendant quelques heures.
D’autres encore qui avaient compris, grâce à certains sites grand public, que les filles arabes du 93 étaient de vraies salopes, oui, des chiennes qu’il fallait baiser en urgence. Il fallait baiser aussi les jeunes Russes, les vieilles. Les amputées, les grosses, les femmes enceintes. Les beurettes soumises. Les naines. Les grosses moches. Et tout cela se mélangeait dans des cerveaux fragiles. C’était un nouveau marché qui rapportait beaucoup.
Les arts, finalement, ça n’avait plus tellement d’importance. Je crois que c’était assez illusoire d’imaginer que les arts, désormais, pouvaient nous sauver. L’important dans cette histoire, c’était que nous étions sur le point, enfin, de nous transformer. Des bêtes. Nous étions redevenus des bêtes. Des bêtes immondes ».
Zidane au George V
Pierre-Louis Basse, journaliste sportif (Europe 1), se dit dégoûté du sport spectacle, comme il l’a raconté dans l’émission « minuit dix » (sur France Cul).
Mais ça ne l’empêche pas de réserver la dernière scène du livre à un footballeur. Le plus grand : Zidane.
Zidane, quand il vient à Paris, loge au cœur du triangle d’or. Et Pierre-Louis Basse écrit : « A sa façon, il avait fracassé le monde intouchable du pouvoir de l’argent. il avait choisi la chambre 238 du George V, comme un ancien bougnoule fait un bras d’honneur à l’usine et au chômage. La France s’était amourachée d’un prince arabe. Il y avait peut-être, dans ce pays, un temps pour les ratonnades, un autre pour la gloire. »
En plus:
Pierre-Louis Basse dans wikipédia
Paris au mois d'août I, II, III, IV, V, VI, etc. (série de photos prises sur les Champs, au mois d'aout)
(Photo: Paris au mois d'août, Nike Paris)
Et Maradonna
Commentaires
"Le triangle d’or, pour lui c’est l’étranger."
Le siège de ma boite était rue Marbeuf entre 87 et 95, j'y ai bossé 6 mois en 1993 et j'ai bossé 6 ans "en face", rue de Berry, ce qui fait que je connais assez bien ce quartier.
Quand on sait s'attarder dans un quartier (tu connais la position que j'occupe dans les quartiers : accoudé aux comptoirs, près de la caisse !), on découvre un 8ème arrondissement très sympathique, presque populaire. La seule différence avec les autres quartiers c'est qu'entre les employés, les ouvriers, les concierges, les artisans, ... on trouve des vieilles bourges peinturlurées qui dégustent leur petit crème !
Mais heureusement qu'il y a la rue Marbeuf dans le coin...
@Nicolas,
Oui, c'est comme tous les quartiers de Paris (et de sa proche banlieue!): ça a toujours un charme fou et les habitants ont toujours une classe dingue. Et les cafés, il y avait un article récemment dans un journal amériacain qui disait que les américains nous envient...
percutant!
merci de me faire connaitre cet auteur dont j'ignorais l'existence.
Je ne viens pas souvent à Paris, mais toujours avec le même plaisir, je passe d'un quartier à l'autre, j'observe, j'écoute.
J'aime les quartiers colorés, métissés, vivants.
Il y a quelques années j'allais chez un ex beau frère, à Neuilly, un ennui, une tristesse!
céleste,
Eh oui, c'est ça la société cloisonnée.
comme céleste lorsque je viens à paris je musarde le nez au vent dans les quartiers populaires, vivants, grouillants, jamais je ne me suis sentie aussi bien que dans ceux là
dans ce triangle d'or je m'y ennuie comme un rat mort (une rate morte), cela ne me fait pas réver, cela m'angoisse même
@Les yeux,
Oui, c'est vrai, il y a de la vie dans les quartiers "populaires", même si ce qualificatif ne s'applique plus beaucoup car le "peuple" déserte Paris à cause du prix des loyers.
Mais j'aime bien les lieux à touristes. J'aime voir l'émerveillement des USA, qui vivent une semaine exceptionnelle en Europe.