Chatroulette: le nom dit bien ce qu'il veut dire. C'est un chat et ça marche comme la roulette russe, c'est-à-dire au hasard. On discute avec webcam avec n'importe qui à travers le monde. Chacun se filme et découvre au hasard son interlocuteur du moment, et s'il veut changer, il appuie sur Next.
Le résultat est souvent trash. Les personnes se filment dans toutes les positions ou avec un masque sur la tête. Bref, le jeu (interdit au moins de 16 ans) est mi exhibitionniste mi voyeuriste.
J'ai essayé, comme tout le monde, et j'ai trouvé ça peu intéressant mais déconcertant.
Le créateur de Chatroulette est Andrey Ternovskiy, un russe de 17 ans, selon le New York Times.
Un petit frisson
Un petit frisson de transgression parcourt la personne qui se connecte à ce service.
Enfin, ce qui me parait intéressant (et effrayant) dans ce site, c'est que, pour la première fois, on nous propose de "parler avec n'importe qui". Et, soi-même, on est traité comme "n'importe qui" (ce qui rappelle le slogan de Rémi Gaillard).
Amour liquide
Parler avec n'importe qui, se connecter, se déconnecter, ne pas s'engager dans une relation: on reconnaît là la thèse de Zygmunt Baumann, dans la Vie liquide.
La vie liquide, c'est une vie où tout change, où une habitude laisse place à une autre. Un produit est tout de suite remplacé par un autre. Et même les relations entre les personnes suivent ce rythme. Ces nouveaux rapports sociaux, comme les appelle Laurent Enzo François, sont extrêmement précaires. Donc, liquides.
Anti Facebook
Avec Chatroulette, il nous est donc permis d'expérimenter la liquidité absolue des rapports humain. Je prends, je teste, je jette. Un moraliste du XVIIe siècle trouverait cela effroyable!
Facebook, en revanche, nous avait habitué à la notion de statut (et de statusphère). Sur Facebook, chacun a une statut, avec son vrai nom, sa photo et tous les éléments de son identité. Cela confère à ce site une apparence de solidité. D'ailleurs sur Facebook, on discute avec un cercle restreint d'amis. C'est plus rassurant.
Cela dit, chatroulette n'a rien inventé. Vous connaissez sans doute des dizaines de services basés sur ce principe. Par son côté trash il rappelle des sites comme 4chan.org. Mais je ne pense pas que ça ira au-delà du buzz et de la curiosité. Qui a envie d'être pris pour n'importe qui?
Un projet lancé pour le plaisir
Le créateur du site n'avait pas d'idée précise au départ. Agé de 17 ans, il a codé lui-même le programme.
"J’ai créé ce projet pour m’amuser. Au début, je n’avais pas d’objectif commercial. Je l’ai créé récemment. J’étais et je suis toujours moi-même un adolescent, c’est pour ça que je sentais ce que les autres adolescents voulaient voir sur Internet. J’aimais moi-même parler à des amis avec Skype en utilisant un micro et une webcam. Mais finalement on s’est lassé de se parler les uns les autres. J’ai donc décidé de créer un petit site pour moi et mes amis où nous pourrions nous connecter aléatoirement avec d’autres gens.
Cela n’a pas été si facile pour moi de le créer, mais je code depuis l’âge de 11 ans (grâce à mon père qui m’a amené tôt sur le web - la plupart des mes connaissances viennent de là). (traduction Owni)
photo: nymag