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"Le Monde", symbole devenu odieux

En ce moment, il est question du rachat du Monde. Et il semblerait que les langues se délient au sujet de cette institution au prestige écorné. Le Monde est un symbole devenu odieux à certaines personnes, et pas seulement aux nostalgiques du quotidien d'Hubert Beuve-Méry.

Luc Rosenzweig est un ancien rédacteur en chef du Monde. Le Monde n'est plus qu'une marque, écrit-il dans Causeur :

Ce Monde là n’est plus, et celui qui va être mis en vente vendredi porte, certes, le même nom que celui évoqué plus haut, mais n’a plus rien à voir avec ce qu’il fut jadis. Ce n’est plus un journal, c’est une “marque” dont des cadors de la presse et de la finance se disputent l’acquisition, pour la mettre au service de leur stratégie politico-économique, ou peut-être même, qui sait, pour la revendre avec une confortable plus-value après l’avoir “downsizée” grave.

Rosenzweig critique aussi le rôle de la société des rédacteurs du Monde.

Didier Lestrades (qui est, notamment, auteur de chroniques dans Libération) le dit tout net: "Je déteste Le Monde".

"Nous sommes face à la plus grande crise économique depuis des décennies, les gens sont en train de hurler aux quatre coins du monde, BP inonde les océans de pétrole, Gaza est toujours sous le siège, Jérusalem est découpé en zoning, l’Europe se déchire, c’est la Gay Pride dans quelques jours (eeeeek) et que se passe-t-il en France ? On nous emmerde avec le « sauvetage » du Monde. Vous croyez vraiment que Le Monde va aider à la résolution de ces problèmes ? Si vous le croyez, vous êtes encore plus stupides que moi et vous méritez d’être transporté sur le champ dans un ashram cauchemardesque dont l’emploi du temps serait mis au point par Carla Bruni, Arielle Dombasle et une autre starlette de ce genre."

Philippe Kieffer se demande, dans Rue89, "pourquoi cette rage à vouloir s'offrir un Monde finissant?"

Grandiloquent à souhait, teinté du regret d'un prospère passé qui ne reviendra jamais, le microcosme ressasse jusqu'à l'auto-intoxication ses fantasmes favoris. Ainsi, peut-on lire et entendre un peu partout, de blogs en déclarations, d'éditos en tribunes, il en irait avec le cas du Monde de « l'avenir la démocratie » et d'une presse écrite décrétée « indispensable à son bon fonctionnement »… Raisonnement et clichés d'un autre siècle, qui furent vrais mais ne le sont plus que de moins en moins.

Selon lui, le rachat du Monde est un non sens économique, qui s'explique par une arrière-pensée: l'élection présidentielle de 2012.

L'acquisition du Monde, à ce tarif-là, est davantage qu'une folie passagère. C'est un non-sens durable, qui ne sauvera rien, hormis les immédiates apparences de continuité d'une entreprise qui se sait en fin de vie. Car comme tous les quotidiens nationaux de France, le Monde serait -est déjà, virtuellement- mort sans la morphine vitaminée des aides et subventions que perfuse l'Etat à une presse française sous haute dépendance économique.

Acheter le groupe Monde dans son entier, en l'état, c'est délibérément acheter une affaire où, à rebours de ce que psalmodient des conseilleurs qui ne seront jamais les payeurs, il n'y a à gagner que des pertes. C'est se bercer de l'extatique illusion qu'en possédant le Monde on « fera » le prochain président de la République. Faut-il être à ce point déconnecté des réalités du pays, et des modalités nouvelles d'information et de formation des opinions, pour croire qu'un quotidien, demain modifiera d'un iota les intentions de vote des français…

Commentaires

  • Je pense que dans le projet du rachat du Monde, il y a aussi la folle ambition de participer modestement à une légende de l'histoire de la presse. Mais évidemment, il y a légende et légende : par exemple, l'Illiade a été une grande légende, mais aujourd'hui c'est un nom de restaurant.
    Le Monde est certes une imposture, mais que reste-t-il de sa légende ?

  • @Jean-no,

    Il reste des journalistes de qualité. J'en connais certains. J'en lis d'autres qui méritent le respect.

  • Manifestement, il y a dans cette affaire de rachat du 2012 à tous les étages. C'est dire à quel point le titre est aux abois. Dommage pour l'utopie de 1945.

  • Le Monde a fait son temps dans sa forme actuelle. De là à dire qu'il va s'effondrait, il y a une monde à mon avis!

  • Je suis assez surpris par le rejet de la proposition formulée notamment par Orange. Certes, France Télécom est assez prédateur sur ses marchés, mais c'était certainement la seule proposition portant un projet d'avenir par la convergence du papier et du support numérique. Quand on voit les espoirs énormes suscités par un produit comme l'iPad, tourner le dos à la seule proposition crédible qui pouvait rendre concrète cette promesse de futur est étrange...

  • @Pierre: Orange n'a plus un projet qui tienne debout en matière de TIC d'après-demain. Comme au Monde, ils ont des équipes fatiguées qui regardent avec horreur et incompréhension Google et Apple manger l'une après l'autre toutes les parts du gateau... ;)

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