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Karpov, les machines et les hommes

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Anatoli Karpov est une légende. Champion du Monde d'Echecs de 1975 à 1985, il incarne les échecs classiques, tels qu'ils se pratiquaient en Union Soviétique. C'était avant la chute du mur de Berlin. Avant l'arrivée des ordinateurs.

Dans une interview récente il critique l'usage de l'ordinateur dans les échecs. Les joueurs s'entraînent contre les ordinateurs. Ils finissent pas "penser" comme eux.

Voici un extrait de l'ITV:

Journaliste: On peut déjà parler de la dépendance des joueurs d’échecs aux ordinateurs. Beaucoup de grands-maîtres se sont habitués aux ordinateurs et ne peuvent déjà plus imaginer leur existence sans eux.
Karpov: On arrive à des extrêmes comiques. Vous analysez avec un collègue une certaine position et la première chose qu’il fait est de lancer l’ordinateur : « Et que dit Fritz ? ». Je réponds : « Mais attendez, nous allons nous asseoir, réfléchir, juger par nous-mêmes, trouver quelques plans et nous regarderons ensuite avec l’ordinateur. »

Journaliste: Plus une fois je me suis convaincu qu’y compris de forts grands-maîtres n’ont déjà pas confiance en leur propre réflexion.
Karpov:  Ce n’est pas tant qu’ils n’ont pas confiance, mais ils ne veulent plus s’embêter. Néanmoins, si vous utilisez toujours l’ordinateur, vous perdrez inévitablement la capacité d’analyser, de prendre des décisions indépendantes et vous vous transformerez en opérateur des décisions de l’ordinateur. […] L’utilisation trop importante des ordinateurs pendant l’entraînement réveille parmi les joueurs d’échecs un automatisme exagéré. Par exemple, je suis convaincu qu’Anand n’a jamais pu se transformer en un joueur d’échecs génial parce que les ordinateurs l’ont asséché.

Les machines ont quelque chose d'humain, puisqu'elles ont été créées par des hommes. Inversement, les hommes ont quelque chose de "machinique". Ce quelque chose, c'es l'habitude. Chaque fois que nous effectuons un geste habituel, machinal, nous nous comportons comme une machine. Et les machines nous forcent à devenir des machines. Comment ne pas devenir une machine: être créatif.

Photo © Europe-Echecs

Commentaires

  • Le calcul sans émotion ou bien même, l'incapacité de calculer de tête. Effectivement, les «machines» font à notre place des choses qu'ensuite nous oublions de savoir faire.
    Sujet de science-fiction souvent traité et Karpov a raison de vouloir garder le côté humain des échecs avec sa part d'émotion, d'émotivité et donc de créativité humaine ! :-)

    [Il ne manque pas un article depuis ce matin ? :-) ].

  • n'est-ce pas un choix entre perfectionnisme machinique et imperfection humaine ?
    je vote sans hésiter pour l'imperfection humaine et toute sa misère et toute sa grandeur ; seul l'humain fait battre mon coeur
    même si les machines suscitent mon admiration , c'est l'humain sous-jacent qui m'émerveille

    et puis ce pouvoir de décider seul , sans béquille permanente , quitte à se tromper ( on en revient au perfectionnisme , à une certaine infaillibilité , une forme de toute puissance )

  • @1maman,

    oui c'est cette imperfection qui ouvre vers autre chose et permet les plus grandes découvertes. Un homme "parfait" serait un homme mort, qui n'évolue plus.

  • dans bien des domaines scientifiques cela a en effet été le cas , mais aussi en cuisine !!! :-)

  • A vot' bon coeur messieurs dames, ce lien va vous plaire !
    http://fanette316.typepad.fr/absolute/2007/04/achetez_du_sark.html
    celui ci aussi, la côte des certificats de la Société Générale100% Sarko ont pris 3% :
    http://www.sgbourse.fr/quotes/details/index.php?code=4369S
    nous allons vous faire aimer l'avenir !!

  • Karpov, c'est aussi le grand méchant loup des échecs de la glaciation soviétique. L'homme du pouvoir.

    C'est pourtant comme tu dis un génie des échecs.
    Et je partage son point de vue sur les ordinateurs qui assèchent.

    Une seule solution : la créativité !

    Zgur

  • @Zgur,

    Oui, Karpov était le chouchou du régime. Il était même député je crois.

    Je l'ai rencontré une fois. C'était à Disneyland Paris. J'entraînais un jeune champion d'Echecs. Je discutais avec la maman d'un autre jeune joueur et Karpov est arrivé. Il portait un polo Lacoste d'une horrible couleur violette. La mère du jeune joueur, qui était psychanalyste, a dit: "Le violet, c'est la couleur des fous".

    Hmm, hmm...

  • Pour ma part, je ne partage pas cet anti-machinisme convenu. (Euh… J’arrive un peu après la bataille non ?) Mener l’analyse d’une partie en discutant entre joueurs, au moyen de l’ordinateur, peut être tout à fait fécond.
    Qualitativement d’abord : l’ordinateur calcule plus vite que l’humain (et l’on n’a pas toujours beaucoup de temps devant soi pour analyser une partie…).
    Psychologiquement ensuite : car avec l’ordinateur, un tiers s’introduit. Il ne s’agit plus alors de savoir lequel des deux joueurs est le plus fort, mais de comprendre « ce que dit Fritz » : on passe de la confrontation au dialogue, et l’on se fixe un but commun. C’est bien une relation humaine qui s’établit grâce à la machine. Relation que Karpov refuse, sans doute pour ne pas renoncer à une position de pouvoir (mais je m’avance de manière déraisonnable).
    Enfin, du point de vue cognitif, chercher à comprendre les recommandations de l’ordinateur, c’est bien chercher à comprendre la position, à faire des plans, réfléchir, et au bout du compte, juger par soi-même.
    On pourrait comparer la position de Karpov à celle d’un chercheur qui refuserait de se documenter tant qu’il n’aura pas trouvé lui-même la solution au problème qu’il étudie. J’imagine que Karpov ne se sert de son téléphone portable que lorsqu’il est sûr que toutes les cabines téléphoniques sont en panne et qu’il n’a aucun pigeon voyageur à sa disposition.

  • @Nathanael,

    Merci de ton commentaire! Non, il n'arrive pas trop tard.

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