Récemment une écrivaine disait à la radio:"En ce moment, je lis Kafka."
L'intensité de sa voix trahissait une émotion particulière. Comme si pour elle le fait de lire Kafka avait une signification très forte, incompréhensible du commun des mortels.
Je ne suis pas certain d'avoir saisi ce qu'elle a voulu dire.
Lire Kafka, c'est comme partager un secret. Tenter d'y avoir accès mais ne pas y parvenir tout à fait. Rester en dehors.
Kafka est associé à l'idée de jeûne, de faiblesse physique, de maladie, même si on sait que Kafka jeune était au contraire plutôt sportif.
Lire Kafka c'est ne pas pouvoir s'en empêcher. C'est être la proie d'une étrange maladie. La maladie de la mort (Duras), la maladie à la mort (Kirkegaard).
Pour exprimer ce qui est contenu dans l'expression "vous lisez Kafka", il faudrait user d'une comparaison. Une comparaison possible serait "le martyre juif", tel qu'il apparaît dans le livre de Marguerite Duras, Yann Andréa Steiner.
Dans Yann Andréa Steiner, Marguerite Duras judaïse le nom de Yann Andréa (son dernier compagnon) en ajoutant un patronyme germanique.
Dominique Denes écrit dans Marguerite Duras écriture et politique (p.183): "des personnages enfermés dans leur solitude ou leur maladie sont judaïsés, et de ce fait, leur douleur prend une autre dimension. Judaïser le nom a une double fonction, à la fois cathartique et mémoriale. Duras écrit:
[...] J'ai inventé le nom, peut-être, pour pouvoir parler des Juifs assasinés par les Allemands."".
Voilà le point que je voulais toucher: cette solitude essentielle, cet enfermement. Ce lieu, où l'on ne peut communiquer avec personne. Ce territoire où l'humanité est bannie. Un territoire secret, inviolable.
C'est ce territoire que nous fait entrevoir Kafka. Kafka n'aurait pas pu être un blogueur...
Commentaires
Très le article, il y a beaucoup à dire, je compte sur les autres pour s'en charger... :o)
Pour "Kafka Blogueur", j'ai un doute, la technologie, enfin l'outil, change résolument le comportement des hommes. C'est comme le paradoxe "Kafka maladif / Kafka sportif" que tu évoques, il y a un peut-être un paradoxe "Kafka écrivain maudit / Kafka lisant ses textes à ses amis " ?
Oui, c'est plein de paradoxes. La conclusion est un peu un pied de nez et aussi une remarque: l'écrit des blogs est souvent du "clavardage" ou du "parlécrit", et la littérature c'est vraiment autre chose que de la communication.
Vous avez essayé le Temesta ou autre anxiolytique ?
Vous avez essayé le Temesta ou autre anxiolytique ?
@Tonnegrande,
Vous descendez bien bas!
Va, je ne vous en veux point...
Je ne sais pas pour Kafka blogueur, son journal a été très longtemps mon livre de chevet. C'est plutôt drole, curieux comme ouvrage.
J'ai toujours eu une image positive et tonique de Kafka, s'il a intéressé Alexandre Vialatte et Woody Allen ce n'est peut-être pas par hasard...où alors c'est le voile d'ironie sur un désespoir profond :-)
Cela étant, êtes-vous vraiment obligé d'employer ce vocable atroce : "écrivaine" ?
@Didier,
Atroce, ça dépend! Certaines écrivaines acceptent le terme, d'autres non! Il n'est pas très joli, peut-être, mais il faut se demander pourquoi on ne le trouve pas beau...
Ce n'est pas tellement qu'il soit laid, c'est qu'il N'EXISTE PAS et est, de plus, inutile. Le genre d'un métier ne dépend en aucune façon du sexe de la personne qui l'exerce. C'est ainsi qu'un homme peut être UNE sentinelle, une femme UN écrivain, un homme UNE estafette, etc.
J'ajoute qu'une femme acceptant d'être appelée "écrivaine" se disqualifie irrémédiablement à mes yeux en tant... qu'écrivain.
Lire une oeuvre romanesque c'est partager un secret, au moins avec son auteur et parfois avec d'autres lecteurs au hasard d'une discussion.
On peut avoir une préférence pour Kafka dont certains écrits mettent en scène un individu en butte à des structures impersonnelles et lointaines, et à des décisions arbitraires qui l'étouffent...
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MarieP